Chers assurés automobiles, soyez rassurés : la jurisprudence reconnait que le vol de votre voiture sans effraction puisse être indemnisé par votre compagnie d’assurance.
Les contrats d’assurance automobile détaillent les évènements pris en charge par la compagnie en cas de sinistre.
Concernant le vol du véhicule, les conditions générales du contrat souscrit définissent le vol comme suit:
« Le vol est la soustraction frauduleuse :
- commise par effraction du véhicule et des organes de direction ou du garage dans lequel il est stationné,
- ou consécutive à un acte de violence à l’encontre du gardien ou du conducteur du véhicule ».
La première situation pose souvent des difficultés en cas de litige.
Partons de l’hypothèse où l’assuré se fait voler son véhicule : il porte donc plainte et déclare le sinistre à son assurance.
Dès lors que le véhicule n’était pas ouvert et que les clés n’étaient pas présentes dans le véhicule ou elles même disparues, l’assurance considère qu’il s’agit d’un vol par effraction.
L’assuré remet donc l’ensemble des clés à l’assurance qui l’indemnise conformément aux termes du contrat.
Cependant, quid quand le véhicule est retrouvé et qu’il ne présente aucune trace d’effraction et qu’il est bon état ?
Dans ce cas, la compagnie d’assurance fait intervenir un Expert afin qu’il se prononce sur la matérialité du vol.
Quid, là encore, lorsque l’Expert mandaté par la compagnie conclu à l’absence d’effraction ?
Le plus souvent, forte de ces conclusions, la compagnie d’assurance sollicite de son assuré le remboursement des sommes versées au titre de l’indemnisation.
La compagnie d’assurance estime que dès lors qu’il n’y aurait pas eu d’effraction, le sinistre déclaré n’est pas couvert : les conditions de qualification de vol n’étant pas remplies.
Ce que les assurances taisent volontiers c’est que le vol sans effraction existe et doit être indemnisé.
Il a ainsi pu être jugé que : « l’on peut faire démarrer un véhicule sans détériorer le faisceau électrique et donc que le vol peut être avéré même en l’absence de traces d’effraction »[1].
En effet, en raison de la modernisation des voitures actuelles et de leur clé, des nouvelles techniques de vol ont été élaborées tel que le piratage informatique de la clé d’ouverture ou du système de démarrage.
Plusieurs articles en font état : il s’agit du « mouse jacking » :
Article du 20minutes du 3 mars 2017 :
« Le mouse-jacking ou encore appelé vol à la souris est une technique de vol de voiture de plus en plus répandue en France il consiste à pirater le système informatique de votre véhicule pour le voler.
Le mouse jacking permet au voleur de pi rater la sécurité informatique de votre voiture. Lorsque vous stationnez sur une place de parking par exemple, vous appuyez sur votre clé pour la fermer. Le voleur, placé à proximité, intercepte le signal de votre clé avec un brouilleur d’ondes. Il empêche ainsi la fermeture de votre véhicule sans que vous vous en rendiez compte. Il peut ainsi entrer dans la voiture rapidement et sans effraction ! Le voleur utilise ensuite un logiciel pour programmer une clé vierge afin de faire démarrer le véhicule. »
Article du site 60 millions de Consommateurs du 20 avril 2016 :
« Le magazine 60 Millions de consommateurs vient de signaler un arrêt de la cour d’appel de Paris, en date du 22 septembre 2015, qui devrait intéresser les victimes de vols de voitures sans effraction. Elles sont de plus en plus nombreuses, car les voitures modernes, bardées d’électronique, sont dérobées selon la technique du « mouse jacking », ou vol à la souris.
(…) La Macif, qui assure le véhicule, refuse de faire jouer sa garantie, car celui-ci ne présente « aucune trace d’effraction au niveau de l’antivol de direction ainsi que sur les barillets extérieurs et sur le bouchon de carburant ». Un expert mandaté par Christophe C. explique en vain qu‘ « il est parfaitement aisé de pénétrer dans un véhicule sans laisser de trace d’effraction, en utilisant une ventouse, un coussin ou une poire, en vente libre sur Internet, qui permettent d’écarter une porte de son cadre sans la détériorer ».
L’expert précise qu’il existe des moyens électroniques de faire démarrer les véhicules, que divers sites proposent notamment des clés Peugeot vierges, et qu’à l’aide du boîtier fourni aux acheteurs, il est possible de lire le code d’anti-démarrage et de faire démarrer le véhicule; il ajoute qu’un produit, le « key-educator, permet de coder une empreinte de clef vierge et de démarrer le véhicule sans déprogrammer les anciennes clés et sans laisser de trace » .
(…) La cour d’appel de Paris observe que « la Macif ne produit pas de pièce susceptible de contredire les éléments décrits par l’expert notamment l’absence de rupture des faisceaux électroniques ». Elle juge que l’effraction électronique constitue une effraction au sens commun du terme, et que « la garantie de l’assureur est due » ».
De même, la Cour d’Appel de MONTPELLIER du 10 octobre 2017, dans une espèce où l’effraction n’avait pas été caractérisée et où l’assuré avait plaidé la théorie du vol sans effraction, a pu jugé que « un faisceau d’indices suffisants démontre en l’espèce la matérialité du vol, de sorte que l’assureur, qui ne démontre pas le contraire, est mal fondé à dénier sa garantie qu’il avait pourtant reconnu le 4 mai 2012 selon un faisceau d’indices qu’il estimait suffisant »[2].
Il est regrettable que les compagnies d’assurance n’adaptent pas leurs conditions générales en ce sens, espérant que leurs assurés n’auront pas connaissance de ces nouveaux apports jurisprudentiels et ne pourront donc utilement se défendre.
Reste à espérer que la jurisprudence abonde en ce sens, obligeant peut être les compagnies d’assurance à modifier leurs pratiques.
[1] Cour d’Appel de Paris, le 10 mars 2009
[2] CA MONTPELLIER, ch 01 B, 10 oct. 2017, n°14/09511