Le recouvrement des arriérés de charges a toujours été une problématique importante pour les copropriétés.
Les charges constituent en effet la trésorerie de l’immeuble sans quoi celui-ci ne peut régler ni les factures afférentes à son fonctionnement quotidien ni les factures afférentes aux dépenses exceptionnelles ou urgentes.
Ainsi, le fait de laisser s’accumuler un arriéré de charge cause un véritable préjudice à la copropriété et aux autres copropriétaires qui doivent, de facto, pallier à la défaillance du copropriétaire récalcitrant.
Certaines copropriétés sont ainsi placées sous administration judiciaire ou en faillite…
Jusqu’à la nouvelle loi dite Loi ELAN à présent en vigueur, pour récupérer ses créances, le Syndicat des copropriétaires n’avait d’autre choix que de saisir le Tribunal (d’instance ou de Grande Instance en fonction du montant réclamé) d’une demande de condamnation des charges échues et non réglées.
Si le copropriétaire ne se présentait pas à l’audience, il était impossible d’actualiser le montant des demandes.
De plus, le syndicat des copropriétaires n’était quasiment pas indemnisé des dépenses engagées pour recouvrer ses sommes, ou très peu.
Et, cerise sur le gâteau, il fallait réassigner quelques trimestres plus tard pour obtenir un nouveau jugement concernant les nouvelles charges impayées.
Les coûts étaient donc multipliés …
Bien sûr, il existait depuis le 13 décembre 2000 une procédure plus rapide, mais très rarement utilisée dans la pratique car elle n’avait vocation qu’à recouvrer les charges de l’année en cours (comprenant les charges à venir pour cette année précise) et non l’arriéré de charges des années précédentes.
Il aurait donc fallu faire deux procédures, une pour l’arriéré des charges échues, l’autre pour les charges à venir de l’année en cours, en sachant qu’il n’était pas possible d’obtenir une condamnation pour les charges relatives aux travaux non pris en compte dans le budget prévisionnel…
Le législateur a donc véritablement innové avec la loi ELAN en modifiant l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 puisqu’à présent la procédure « accélérée » concerne les arriérés de charges, mais également les charges à venir pour l’année en cours y compris les travaux non pris en compte dans le budget prévisionnel.
L’article dispose que :
A défaut du versement à sa date d’exigibilité d’une provision due au titre de l’article 14-1 ou du I de l’article 14-2, et après mise en demeure restée infructueuse passé un délai de trente jours, les autres provisions non encore échues en application des mêmes articles 14-1 ou 14-2 ainsi que les sommes restant dues appelées au titre des exercices précédents après approbation des comptes deviennent immédiatement exigibles.
Le président du tribunal de grande instance statuant comme en matière de référé, après avoir constaté, selon le cas, l’approbation par l’assemblée générale des copropriétaires du budget prévisionnel, des travaux ou des comptes annuels, ainsi que la défaillance du copropriétaire, condamne ce dernier au paiement des provisions ou sommes exigibles.
Le présent article est applicable aux cotisations du fonds de travaux mentionné à l’article 14-2. (…)
Autre innovation primordiale : avant la loi ELAN il était laissé la possibilité au juge de condamner « le juge peut condamner »…
A présent, il est précisé que si les conditions sont réunies « le juge condamne ».
Quelle audace ! certains magistrats y verront sans doute un « grignotage » de leur appréciation souveraine, quand d’autres y verront une avancée majeure et le début de la refonte du droit de la copropriété.
Même si la rédaction de l’article parait un peu obscure, l’on retiendra l’effet amplement dissuasif de cet article qui permet à la copropriété d’obtenir la condamnation du copropriétaire défaillant, non seulement à l’arriéré de charge, mais également aux charges votées à venir, en ce compris les travaux hors budget souvent coûteux !
Le processus sera le suivant :
- 1/ défaut de versement à la date d’exigibilité d’une provision
- 2/ nécessité d’une mise en demeure infructueuse dans un délai de 30 jours dans laquelle il faudra viser le nouvel article 19-2 et expliquer ses conséquences afin « d’inviter » le débiteur à régler ;
- 3/ saisine du Président du Tribunal de Grande Instance en la forme des référés avec un dossier complet comportant un extrait de matrice cadastrale, les procès-verbaux d’assemblée générales et appels de fonds, le dernier procès-verbal d’assemblée général avec une attestation de non contestation du syndic, les relances du syndic et enfin la mise en demeure.
L’objectif :
- 1 /Ne plus attendre et laisser l’arriéré de charges non payées s’accumuler pour assigner,
- 2/ Optimiser la procédure judiciaire
- 3/ Réduire les coûts et les délais pour les copropriétés.
Notre cabinet se tient à votre disposition pour vous accompagner et vous conseiller dans le cadre de cette réforme.
Linda HALIMI-BENSOUSSAN & Margaux DUVERGER
Avocats à la Cour